Pérou : Arequipa, le canyon de la Colca et Trujillo

Nous sommes arrivés à 6h du matin à Arequipa après une nuit dans le bus depuis Cusco, Arturo nous attendait avec sa voiture pour nous accompagner à son petit hôtel situé dans le centre-ville. Il nous a accueillis comme des membres de sa famille : nous avons eu notre chambre tout de suite, nous nous sommes douchés et il nous a offert notre petit-déjeuner. C'était hyper agréable : nous étions en terrasse, au soleil, face aux trois volcans (Chachani, Misti et Pichu Pichu) qui dominent Arequipa, sous des températures beaucoup plus clémentes qu'à Cusco.

Pierre est allé chez le coiffeur : il est passé du style baroudeur à Cristiano Ronaldo en quelques instants.

Pour cette première journée, nous sommes allés visiter le couvent de Santa Catalina, fondé en 1579. Ce couvent, le plus grand du monde, est une ville dans la ville tellement c'est vaste avec des ruelles, des églises, des cloîtres, des places etc. Pendant 400 ans, les religieuses, souvent les cadettes issues de grandes familles espagnoles accompagnées de leurs servantes africaines (on pensait d'ailleurs à l'époque que ces dernières n'avaient pas d'âme !), ont vécu en clôture, c'est à dire totalement coupées du monde. Les appartements étaient assez spacieux et disposaient tous d'une cuisine individuelle ainsi que d'une pièce pour loger les esclaves dont chacune disposait. Seule une quinzaine de nonnes vit encore aujourd'hui au couvent mais elles ont désormais le droit de parler et de sortir. C'est un lieu hors du temps, calme, très coloré, nous nous y sommes sentis vraiment bien, loin des bruits de la ville, alors que nous étions en plein coeur d'Arequipa. 

Le couvent Santa Catalina.

Margaux a pris la pause dans une fenêtre, une vraie sainte !

Nous avons déambulé, visitant les chambres, les cuisines, le lavoir aux jarres, le grand bain (elles ne se lavaient les cheveux que 3 ou 4 fois par an !)... toujours dans une quiétude incroyable.

Le couvent Santa Catalina.

Du toit de la chapelle, nous avions une belle vue sur les volcans et nous pouvions apprécier l'étendue du couvent.

En redescendant, nous sommes allés dans le confessionnal des nonnes : une minuscule pièce sans lumière, très claustrophobe, la nonne y rentrait depuis le cloître, le confesseur depuis la chapelle.

En sortant du couvent, où vraiment il n'y avait aucun bruit, nous avons été complètement surpris par le brouhaha extérieur. L'insonorisation dans l'enceinte religieuse était vraiment incroyable. Nous sommes repartis via la place des Armes avec sa cathédrale et ses arcades sur un étage.

Le soir, nous avons retrouvé avec un plaisir immense notre ami Manu et sa compagne Emilie de passage au Pérou. Ils avaient choisi le même hôtel que nous et après un apéro double pisco sour, nous sommes allés dîner tous les six. C'était super de se retrouver là, ensemble, si loin de la France. Merci d'être venus.

Entre amis à Arequipa.

Nous nous sommes levés plus tôt pour les revoir au petit-déjeuner, avant leur départ pour le lac Titicaca (nos itinéraires se croisaient juste). Pour nous (sans les enfants restés jouer sous la garde d'Arturo), le free walking tour d'Arequipa. Grosse déception, le guide nous a plus parlé du Pérou que de la ville, peu d'informations sur l'architecture, bref ce n'était pas axé sur ce que nous étions venu chercher. Un point positif : le lieu de rendez-vous était dans une chocolaterie où on pouvait soi-même fabriquer ses chocolats. Nous nous sommes dits que ça pourrait être une activité sympa à faire en famille.

Free walking tour : place des Armes, laine de lama, collectivo et beaux bâtiments.

En retournant à l'hôtel, nous sommes passés devant un marchand de fruits où nous avons reconnus les fruits mangés avec les BZH à Cusco, l'occasion d'avoir enfin leur nom.

Fruits péruviens.

L'après-midi, nous sommes partis en taxi à la station de bus réserver notre trajet du lendemain pour la Colca. Puis, comme nous nous sentions bien chez Arturo et plus généralement à Arequipa, nous avons changé nos plans : nous avons décidé de ne pas visiter Lima, de rester deux nuits dans le canyon de la Colca et une journée de plus ensuite à Arequipa. Et pour gagner du temps et pouvoir passer trois jours à Trujillo dans le nord du Pérou, nous avons réservé un vol intérieur Arequipa-Trujillo. Après avoir gérer les transports, nous avons consacré le reste de l'après-midi à la visite du Museo Santuarios Andinos. C'est dans ce musée (photos interdites) que nous avons pu voir la fameuse momie Juanita, reine des glaces (trouvée avec plusieurs autres enfants momifiés dans les montagnes andines).

Nous avons d'abord vu un petit film en français retraçant la découverte de la momie et expliquant les sacrifices incas, puis nous avons fait la visite avec une étudiante française en stage au musée. Comme à Salta, nous y avons vu les nombreux objets accompagnant les enfants et notamment les tissus et chaussures qu'ils portaient. C'était très difficile d'imaginer ces jeunes marchant des jours pour atteindre des sommets situés à 6000 m d'altitude alors que même aujourd'hui avec nos équipements, c'est extrêmement complexe. En plus, ces enfants savaient qu'ils allaient mourir. Les explications fournies différaient de celles de Salta : les enfants auraient été choisis dès leur naissance et élevés ensemble. Ils n'étaient pas forcément sacrifiés dans les montagnes de leur ville d'origine et surtout, ils étaient tués d'un coup à la tête après avoir bu de la chicha (bière de maïs très alcoolisée). La tombe de Juanita était cachée sous des glaciers mais l'éruption du volcan situé juste à proximité de sa montagne a fait fondre les glaces. Les mouvements de terrain associés ont fait tomber les pierres fermant sa tombe et le corps de Juanita a glissé dans la pente de la montagne. Elle a perdu le tissu l'entourant et son visage a été exposé au soleil plusieurs jours avant qu'une équipe de scientifiques ne la trouve. Ainsi, son corps est parfaitement conservé avec tous ses fluides (comme elle a été gelée) en revanche son visage a été abîmé par les rayons du soleil. Cette visite nous a encore appris beaucoup sur les sacrifices incas et avoir une guide en français nous a permis de poser plein de questions. 

Après ces deux journées à Arequipa, nous sommes partis de bon matin à 200 km de là, vers la  vallée de la Colca, et son canyon, le second plus profond du monde (3400m de profondeur). 

Pendant le trajet en bus, nous avons à nouveau vu de belles formations rocheuses, 

la neige en passant le col de Patapampa à 4910 m,

et des volcans fumant.

Nous sommes arrivés à Chivay, à l'entrée du canyon, et avons déjeuné dans le premier petit resto que nous avons trouvé. C'était plein de mouches, avec que des plats que nous ne connaissions pas (on a choisi au hasard) mais ce n'était pas cher (on a mangé pour 1,50 euro à quatre soit 3 soles !). 

Nous avons ensuite recherché notre collectivo pour Yanque, notre point de chute. Nous étions tous serrés, Marie a dû passer près du chauffeur (2 places pour 4, ça devenait compliqué)

Nous sommes arrivés sur la place de l'église quasiment vide, seul un groupe de péruviens festoyait en chantant et en buvant. Yanque, située au coeur de belles montagnes a été la première cité construite par les espagnols dans le canyon. La ville a subi d'important dégâts en 2015 suite à un grave séisme et de nombreux stigmates était présents sur les habitations et même l'église.

Yanque.

En cherchant notre hôtel dans les rues désertes, nous sommes tombés sur une installation insolite qui nous a fait froid dans le dos, le temps que nous comprenions qu'il s'agissait... d'un pot de fleurs !

Après avoir posé nos affaires, nous sommes partis en excursion vers les ruines d'Uyo Uyo (elle était proposée gratuitement aux clients de l'hôtel) tous les quatre avec Stefan, un étudiant allemand, pour quelques mois à Yanque où il était nourri, logé, blanchi en échange de services pour l'hôtel. Il parlait vraiment bien français, ce qui nous permis de profiter pleinement de ses explications. Ce village est d'origine pré-inca (ethnie Collahua) ainsi que les terrasses l'entourant. Lorsque les incas sont arrivés, ils ont mis en commun leurs savoirs et ceux des Collahua. Ainsi nous avons pu voir des ruines mixtes où on retrouvait la précision inca dans la taille et l'assemblage des pierres. En traversant un pont, nous avons à nouveau vu les tombes incas creusées à flanc de montagne.

Yanque et les ruines d'Uyo Uyo.

Les espagnols, à leur arrivée, n'ont pas du tout eu cette attitude de partage de savoir, ils ont tout détruit, construit Yanque et forcé les peuples natifs à vivre dans la vallée et à changer leurs croyances. D'ailleurs, ici, il y a beaucoup de ressentiment envers les espagnols contrairement à Cusco par exemple. Nous avons fini l'après-midi par les sources chaudes, il faisait froid dehors car la nuit commençait à tomber. C'était trop bon, nous avons même partagé une bière avec Stefan.

Les sources chaudes de Yanque.

Nous n'avions pas prévu de descendre dans le canyon mais Blandine tenait absolument à faire un treck dans ce super lieu et elle avait donc choisi une randonnée menant à la forteresse de Chimpa (située sur la rive droite du Rio Colca et beaucoup moins fréquentée) et offrant un des plus beaux si ce n'est le plus beau point de vue sur le canyon de la Colca. Nous sommes donc partis en taxi (à 6h30 du matin) vers le départ de ce treck, à 1h15 de route. Nous avons ainsi traversé plusieurs villages de la vallée et passé la rivière pour changer de rive. Le chauffeur, peu loquace, ne tenait pas trop à jouer les guides d'autant qu'il attendait le match Pérou-Danemark à la radio. Le premier match du Pérou en coupe du monde depuis 30 ans ! C'est donc seuls que nous somme partis à l'ascension de la forteresse située à plus de 3100 m d'altitude. Ça montait raide sur 2,5 km avec un dénivelé de 450m et, là encore, heureusement que nous étions adaptés à l'altitude.

Ascension vers la forteresse de Chimpa.

Juste avant la forteresse nous sommes passés à côté de blocs de pierre représentant des maquettes incas des cultures en terrasse.

C'était dur, mais nous sommes arrivés en haut en 1h30 (avec les enfants, bravo les filles) là où normalement il faut deux heures. Nous n'étions pas peu fiers.

La forteresse de Chimpa.

La forteresse a été construite par la civilisation Collahua. Nous l'avons traversée et de l'autre côté nous avons grimpé un dernier pic rocheux qui nous a offert un superbe point de vue sur le canyon et la vallée environnante. Nous étions seuls au monde, hauts perchés, dans ce lieu délaissé par les touristes. C'était fantastique, l'effort en valait la peine. N'est-ce pas Margaux ?

La vallée et le canyon de la Colca.

En prenant nos photos nous avons remarqué de la fumée au dessus d'un volcan, c'était des cendres qu'une éruption venait d'expulser. Apparemment, ça arrive très souvent mais pour nous c'était impressionnant.

Petite éruption de l'autre côté de la vallée.

En repartant, après être restés plus d'une heure là-haut, nous avons récupéré nos manteaux et Marie a manqué de peu de se piquer avec un bout de cactus bien planté dans sa manche. 

Pierre est tombé lui sur un fruit de cactus qu'il a écrasé avec son pied pour voir l'intérieur. Ça ressemblait à du kiwi mais nous n'avons pas osé goûter alors qu'a priori c'est comestible mais très acide.

La forteresse de Chimpa.

Nous avons mis une bonne demi-heure à redescendre, en sautillant mais en prenant garde de ne pas glisser sur tous les graviers et cailloux jonchant le sentier. Le panorama était sublime.

Sur le sentier de la forteresse de Chimpa.

Nous avons retrouvé notre taxi et sommes repartis vers l'hôtel. En route, nous sommes passés devant un merveilleux paysage de cultures en terrasses (pour la plupart pré-incas) et sommes tombés nez à nez avec deux lamas peu farouches errant sur la route.

Sur la route entre Chimpa et Yanque.

De retour à Yanque, les rues étaient toujours aussi désertes (il faut dire que se jouait la fin du match du Pérou), seule une tisseuse s'était installée à l'ombre et s'aidait d'un poteau électrique pour exercer son art.

Nous avons déjeuné sur la place, c'était la toute fin du match, les péruviens ont perdu, le restaurateur pleurait. Drôle d'ambiance. Son fils, un peu délaissé n'a eu de cesse de venir jouer autour de notre table, il semblait intrigué par les filles.

Nous étions tous un peu fatigués après le treck du matin, mais notre Margaux était elle pleine d'énergie car nous lui avions promis une ballade à cheval. Elle est donc partie seule avec son guide pour une randonnée de deux heures. Elle en est revenue avec un sourire jusqu'aux oreilles.

Margaux part en randonnée à cheval.

Après cette belle journée, nous sommes allés le soir (sans Pierre) à l'observatoire astronomique de l'hôtel. Ils avaient un grand télescope grâce auquel nous avons pu voir Saturne et ses anneaux, Jupiter et ses quatre lunes ainsi qu'une galaxie lointaine aux milliers d'étoiles. C'était fabuleux, les filles et Blandine ont adoré.

Pour notre dernier jour à la Colca, nous sommes partis en taxi (cette fois heureusement notre chauffeur était super sympa) à 6h45 du matin pour aller voir les condors au mirador "el condor". Le site est très touristique mais il faut en passer par là pour voir ces majestueux oiseaux (plus de 3 mètres d'envergure) planer. Nous n'avons pas été déçus, c'était magique.

- Femelle juvénile (corps marron et pas de crête sur la tête),

- Mâle juvénile (corps marron avec crête), 

- Mâle adulte (avec une jolie collerette blanche).

Ils ont été jusqu'à dix à voler en même temps, passant parfois juste à quelques mètres de nous.

Les condors du mirador "el condor" dans le canyon de la Colca.

Après les condors, nous avons pris des photos des colibris, très nombreux dans le secteur. 

En repartant, nous avons pu profiter sur les petits marchés des tenues traditionnelles très colorées des habitants de la Colca.

Avant de nous ramener à notre gare de bus de Chivay, nous avons fait une dernière halte sur des petits stands de bord de route. Nous avons pu goûter du jus fabriqué à partir du fruit du cactus que nous avions vu à Chimpa : super bon ! Nous en avons profité pour faire nos dernières photos avec lamas et alpagas.

Petits stands dans la vallée de la Colca.

D'ailleurs, petit aparté, puisqu'on en parle : comment faire la différence entre alpaga, lama, vigogne et guanaco, les quatre camélidés d'Amérique du Sud ?

Tout d'abord, le lama et l'alpaga sont domestiques, la vigogne et le guanaco sont sauvages. Au premier coup d'oeil, on peut dire que le lama est le plus grand, la vigogne de loin la plus svelte et la plus élancée et l'alpaga a une toison extra-touffue. Le guanaco se rencontre beaucoup en Patagonie (jusqu'en Terre de Feu), il est uniformément brun roussâtre avec le ventre et l’intérieur des pattes blancs, il est plus massif que la vigogne.

Pour différencier le lama et l'alpaga, car c'est surtout là qu'on pourrait le plus avoir un doute, il faut regarder la position de la queue, les oreilles et le cou. Le lama a une queue dans l'axe de la colonne vertébrale, le cou est long et les oreilles incurvées vers l'intérieur (difficile à voir de loin), l'alpaga a une queue en position basse, un cou qui semble moins long et des oreilles pointant vers l'extérieur.

Pour rentrer à Arequipa, nous avons pris un minibus avec un chauffeur pilote de rallye. Nous avons retrouvé notre chambre et nos gros sacs (nous étions partis légers) qu'Arturo nous avait gardés sans supplément.

Nous avons commencé notre dernière journée à Arequipa avec la visite de la Compania, une église jésuite avec une belle façade baroque (cf. photo du free walking tour du premier jour). A l'intérieur, nous sommes venus admirer la coupole polychrome de la chapelle San Ignacio peuplée d'oiseaux et de fleurs multicolores. Les photos étaient interdites mais nous n'avons pas résisté tellement c'était beau et insolite.

La Compania.

Après cette visite, nous sommes allés à notre "cours de chocolat". Nous en sommes ressortis après 2h30 de théorie et de pratique tels de fins connaisseurs (maintenant nous savons reconnaitre le bon chocolat) et avec nos propres créations. Article de Margaux à venir sur le sujet. 

Atelier chocolat.

Nous avons terminé notre séjour à Arequipa en nous rendant au marché : énormes stands de jus de fruits, multiples variétés de pommes de terre ou de maïs, légumes, fromages et tout le reste : des balais en passant par les jouets pour enfants.

Le marché d'Arequipa.

Nous avons regagné notre hôtel et offert à Arturo et ses deux fils la moitié de nos chocolats noirs. Les filles ont profité jusqu'à notre départ des jeux,

et nous avons fait une photo souvenir avec ces hôtes plus qu'adorables (nous avons pu profiter de notre chambre jusqu'à 21h). Merci Arturo pour cet accueil ultra-chaleureux.

C'est en taxi que nous avons rejoint l'aéroport pour prendre notre premier vol : Arequipa-Lima où nous sommes arrivés vers 1h du matin. Nous avons dormi sur les bancs d'une salle d'embarquement ; à 4h du matin, une classe de collégiens est arrivée en criant et rigolant comme si de rien n'était, ils ne sont encore vivants qu'uniquement parce que le meurtre est interdit  !). Puis vers 6h, nous avons attrapé notre second vol : Lima-Trujillo.

Nuit pénible dans l'aéroport de Lima.

Nous sommes arrivés en milieu de matinée à Trujillo, située près de la côte pacifique, au Nord du Pérou, sous un ciel tout gris (il le restera pendant trois jours). Apparemment à cette saison, c'est comme ça. La ville n'était pas jolie, le temps était triste, nous nous sommes demandés si nous avions fait un bon choix. Nous nous sommes cherchés un restaurant sympa pour nous donner un peu d'énergie et de baume au coeur : au menu, ceviche de crabe (il y avait vraiment du crabe cru dedans !!)

et de poisson.

Le ceviche est un plat péruvien à base de poisson cru (ou de crabe, de poulpe ou de crevette) dans une marinade appelée "lait de tigre" (jus de citron vert, oignons rouges, ail, coriandre et piment) et servi avec du maïs et de la patate douce. La marinade très acide et pimentée est contrebalancée par la douceur de l'accompagnement. La recette est ici. C'était délicieux, quoique celui au crabe était un peu périlleux à manger.

Bien sur, une grande télé diffusait des images de la coupe du monde, comme partout ici.

Nous sommes ensuite partis nous balader et découvrir le centre avec ses petits stands de rue montés sur des vélos (Bon, Margaux cache le vélo).

Si nous avions choisi Trujillo, c'était pour une raison précise : nous souhaitions découvrir d'autres civilisations que celle des incas : les Moches (entre 100 et 800 ap JC) et les Chimus (de 900 à 1470 ap JC), deux civilisations précolombiennes qui se sont succédées dans cette région du Pérou. Avant de partir en excursion le lendemain sur les vestiges, nous avons visité le Museo de Arquelogia, Antroplogia e Historia. Nous avons débuté avec un squelette préhistorique vieux de 10000 ans (!), les autres salles étaient consacrées aux objets du quotidien de ces deux civilisations, et au milieu des poteries, le crâne d'une prêtresse avec, encore accrochés, d'interminables cheveux.

Enfin, dans la dernière pièce, une exposition temporaire présentait une momie au crâne allongé. Beaucoup de squelettes au Pérou ont été retrouvés avec cette déformation crânienne en cône : on enserrait le crâne des bébés dans des linges, modelant ainsi les os crâniens encore mous. Impressionnant, même si nous sommes maintenant familiarisés (les filles notamment) avec les squelettes et les momies.

Le museo de Arquelogia, Antroplogia e Historia de Trujillo.

Nous avons terminé notre après-midi place des Armes, cerclée de maisons colorées qui apportaient un peu de gaieté à l'ensemble.

Place des armes de Trujillo.

Ici, les excursions ne démarraient pas trop tôt, genre à 6h30 du matin, mais à 10h30, Byzance ! Un minibus est venu nous chercher, puis place des Armes il s'est complètement rempli. Le tour a commencé avec un guide parlant espagnol sauf que nous avions payé un petit supplément pour avoir un guide en anglais. C'était un peu la panique pour le guide hispanophone, qui après avoir passé plusieurs coups de fil nous a rassurés en nous disant que nous allions changer de minibus pour retrouver notre guide anglophone. En fait, notre guide sera même francophone (enfin c'était un peu dur à comprendre de temps en temps mais nous avons apprécié). Nous avons commencé par un arrêt à l'atelier de poterie où sont fabriqués de façon artisanale des objets inspirés de la culture moche.

Nous avons poursuivi par les huacas del sol y de la luna (temples du soleil et de la lune) : ce sont deux pyramides distantes de 500m appartenant à la civilisation Moche (on ne peut visiter que la huaca de la luna). Entre les deux, il y avait une zone urbaine aujourd'hui en cours de fouilles. La photo a été prise depuis la huaca de la luna et montre au fond la huaca del sol.

Ces vestiges ensevelis sous le sable ont été remarquablement conservés au cours du temps, mais les pilleurs et les intempéries ont emporté une partie des secrets. La huaca de la luna était un immense temple en briques d'adobe (que nous avons parfaitement pu distinguer)sur cinq niveaux : selon un calendrier cérémoniel, tous les cent ans en moyenne, un étage était ajouté, masquant totalement le précédent. Mais la beauté du lieu résidait dans les superbes bas-reliefs polychromes : figures géométriques, animaux, dieux... Juste incroyables. Sur la dernière photo, à gauche du Dieu Ai-apaec,

dit le "décapiteur", souvent représenté sur les frises, on peut voir dessiné en tout petit, un pélican mangeant un poisson.

La Huaca de la Luna.

C'était un temple cérémoniel où on pratiquait des sacrifices : des sortes de combats de "gladiateurs" avaient lieu et les perdants étaient déshabillés entièrement, attachés les mains dans le dos, on les égorgeaient (le sang était récupéré et bu par le prêtre en transe), et les corps étaient ensuite jetés en pâture aux vautours. Les photos montrent l'autel cérémoniel où se tenait le prêtre (petits schémas en plus pour mieux comprendre). Les frises murales de cette pièce se sont superposées les unes sur les autres au cours du temps (nous avons pu voir les différents couches de peinture)  et l'autel lui-même a été modifié au fils des années.

La Huaca de la Luna.

Nous avons poursuivi avec la place principale du temple qui nous a offert le clou de spectacle : voici la maquette,

et ce que nous avons vu était vraiment impressionnant par la taille et la qualité de conservation des peintures.

La Huaca de la Luna.

Avant cette visite, nous étions allés avec le guide au Museo de Moche à l'entrée du site (les photos étaient une nouvelle fois interdites, vraiment dommage). Ce musée était passionnant, rempli de poteries, d'objets divers et de tissus sur lesquels les Moches dessinaient, ils nous ont ainsi transmis sans le savoir des informations précieuses sur leur mode de vie et leurs rituels. Il n'y a aucune trace écrite, seuls ces dessins permettent aujourd'hui de les comprendre. Plusieurs objets ont été envoyés récemment au musée du quai Branly à Paris pour une exposition.

Après le déjeuner (dans une gargote locale avec télé allumée sur le foot, juste à côté du restaurant à touristes hors de prix où on nous avait déposés), nous sommes allés à la rencontre d'une autre civilisation qui a succédé aux Moches et qui a longtemps résisté aux incas avant d'abdiquer : les Chimus. Nous avons fait une première halte au Huaca Arco Iris ou temple dédié à la fertilité. C'est un sanctuaire de forme pyramidale où on peut voir sur les bas-reliefs, les danseurs de pluie, symboles de fertilité. Sur la deuxième photo : deux figures se font face, une masculine et une féminine avec à son extrémité une tête lui ressemblant. Sur la troisième photo : les mêmes personnages sauf que la figure féminine a libéré un nouveau petit être et n'a plus rien à son extrémité. 

Huaca Arco Iris.

Nous avons terminé notre découverte de la civilisation Chimu avec la zone archéologique de Chan Chan. C'était la capitale de l'empire Chimu dont on sait relativement peu de choses car eux non plus n'utilisaient pas l'écriture. Ils ont été assiégés pendant 10 ans par les incas à la fin du XVème siècle. Ces derniers les ont privés d'eau pour les contraindre, juste avant la conquête des espagnols. Neufs citadelles ont été bâties sur ces sites, chaque suzerain chimu ayant fait construire la sienne. Chaque ville abrite un mont funéraire pour son roi et sa cour (oui, quand le roi mourrait, on tuait ses serviteurs pour qu'il ne parte pas tout seul dans l'au-delà !). Nous avons visité la citadelle Nik-An, qui comme les autres était cernée de très hauts murs (9m de haut) et construite en briques d'adobe. Nous avons pénétré dans l'enceinte par une étroite entrée puis avons accédé à la place principale (elle servait aux réceptions officielles). Nous avons ensuite suivi un passage où sont représentés des pélicans, des poissons en mouvement, les marées et des filets de pêche.

Place des cérémonies et passage des poissons et oiseaux de Chan Chan.

Nous avons ainsi accédé à la la cité administrative : magnifique lorsqu'on imagine ce peuple évoluer ici. Nous avons retrouvé l'iconographie chère à ce peuple : poissons, oiseaux, les vagues et la lune (importante pour son rôle dans les marées). Des ouvertures en forme de losanges assuraient la ventilation entre les pièces. Ce peuple était résolument tourné vers la mer et ses richesses. Nous y avons vu des pélicans très stylisés, avec en guise d'yeux la croix du sud qui servait de repère aux pêcheurs.

Secteur administratif de Chan Chan.

Nous avons ensuite marché dans les rues de la citadelle jusqu'à la tombe du suzerain, à l'étang (réserve d'eau douce), et au marché. Nous avons enfin pu apprécier, en voyant un mur coupé dans sa hauteur, la quantité de briques qu'il a fallu utiliser pour construire ces citadelles.

Les rues de la citadelle de Chan Chan.

Ces deux civilisations, dont nous n'avions jamais entendu parler jusqu'ici, nous ont passionnés (un peu moins les enfants).  Avoir un guide était indispensable pour les comprendre et voir autre chose que du sable et des cailloux. Les sites étaient vraiment immenses et riches. Aujourd'hui, des toits en tôle protègent les trésors excavés des intempéries, bien que peu esthétiques, ils sont indispensables à la protection du site, tout comme les gardiens qui veillent désormais 24h/24.

Enfin, pour finir cette journée d'excursion, le minibus nous a conduit jusqu'à la petite station balnéaire de Huanchaco, elle aussi sous la grisaille. C'est un spot de surfeurs réputé, mais la ville est également connue pour ses caballitos de totora, petites embarcations en roseaux, qui affrontent les vagues du Pacifique.

Nous avons profité de cet arrêt pour goûter la pâtisserie locale vendue dans des stands de rue : des beignets frits servis avec du miel.

Le lendemain, notre dernière journée au Pérou était un grand jour : le jour du match France-Pérou. Le Pérou, ayant perdu son premier match de poule, était dos au mur, il ne fallait pas perdre, sinon la qualification devenait impossible. L'hôtel a improvisé une petite déco pour nous et nous nous sommes installés face à la télé entourés de clients péruviens, qui nous prenaient en photo.

A la mi-temps, nous menions 1-0 mais les péruviens y croyaient encore, et nous avons donc à nouveau posé.

A la fin du match, ils sont tous venus nous féliciter mais certains d'entre eux pleuraient réellement. Ce pays n'avait pas vécu la coupe du monde depuis 30 ans, autant dire qu'ils étaient tous à fond, jusqu'au boulot : dans la cour d'un garage automobile au sol sableux et en bordel, la télé avait été mise dehors pour ne rien rater (la télé est juste devant le monsieur).

Aujourd'hui encore, on reçoit des messages de félicitations de nos rencontres péruviennes quand la France remporte un match.

Durant cette dernière journée, nous nous sommes reposés, avons dégusté une dernière succulente pizza dans un petit resto près de l'hôtel où nous avions déjà mangé la veille (nous y sommes allés deux soirs de suite tellement c'était bon, pourtant, nous étions les seuls clients !).

A 22h30 nous sommes partis en taxi à la gare de bus Cruz del sur pour effectuer notre dernier long trajet en bus (le plus long) : 18 heures sans arrêt (sauf le passage frontière) pour rallier Guayaquil en Equateur. Nous avons quitté Trujillo à 23h et sommes arrivés vers 16h en Equateur.

Le Pérou, c'était fini. Nous sommes partis heureux de notre séjour dans ce pays si riche culturellement. Nous y avons fait de belles rencontres humaines, nous nous sommes baladés dans de superbes paysages (de l'Argentine au Pérou, les montagnes andines sont fabuleuses), nous avons été au plus près des condors, nous avons découvert des civilisations pré-incas et nous avons définitivement été subjugués par le Machu Picchu et les extraordinaires constructions incas.